jeudi 3 juillet 2008

Le parapluie.

«Si elle passait autant de temps à attendre, c'est qu'elle souhaitait inconsciemment qu'ils prennent une décision pour elle.»

La pluie tombait régulièrement sur les feuilles. Le son de l'eau qui s'écoulait lentement et tout aussi régulièrement dans les caniveaux était rassurant. Elle aimait aussi le bruit des pneus trempés sur la chaussé qui venait casser ce rythme trop régulier. C'était stimulant.

Elle avait laissé la porte grande ouverte pour garder cette odeur mouillée et le vent frais entrait en frolant les rideaux de l'appartement. Elle avait un peu froid. Pourtant, elle restait là, à observer le traffic sous cette pluie matinale, appréciant la brise qui venait durcir ses mamelons sous son t-shirt trop léger. Elle y prenait plaisir.

Dans toute histoire, à travers les descriptions, vient un moment où l'on voudrait savoir pourquoi le personnage se trouve là, et bien pour aller droit au but, cher lecteur, cette jeune demoiselle attend.

Elle attendait. En espérant s'hypnotiser dans l'instant présent, elle échouait sans cesse. Ce moment qui aurait pu être si joli s'il s'était arrêté juste avant était à présent gaché par ses éternels balancements entre un passé et un futur. Tout deux hors de contrôle. Comme ce frisson qui lui traverse le coprs quand elle se rappelle leurs nuits d'amour. Elle oscillait entre les deux, oubliant ce qui l'entourait, puisque trop fade pour se comparer à un souvenir embellie par l'attente. Le monde se déroulait devant ses yeux, à une vitesse folle, et parfois elle se réveillait en sursaut pour s'apercevoir que sa vie passait, et qu'elle ne faisait que sauter d'une semaine à l'autre sans autre but précis que d'avancer plus vite vers cette journée convoitée.

Dehors, la pluie s'intensifiait et les passants, aussi inutile que cela puisse paraître, défilait sous leur parapluie coloré. Quand on y pense, rien de mieux qu'un parapluie pour se créer un univers à soi. Elle les observait, convoitant leur bulle, enviant ceux qui s'y baladait à deux. Et ne pouvant être contrée, l'attente reprenait de plus belle. Un jour, elle aurait son parapluie avec lui.

Maintenant que nous savons qu'elle est en train d'attendre, une autre question s'impose. Pourquoi ? Voyons voir...

Elle n'attendait qu'un signe de sa part pour se fixer, éclairer ses idées à elle, incapable qu'elle était de se jeter à coeur perdu dans une relation ou d'en ressortir avant que l'autre ne l'entoure de sa réalité. Mais, il ne répondait pas et elle comptait les secondes, les goutes de pluie, les grains de poussière, et son désir grondait.

Un éclair de lucidité aurait pu la frapper à cet instant même mais je crois que c'en aurait été trop pour elle. Je me dois donc de vous expliquer ma théorie.

Peut-être qu'un jour, elle avait eu un parapluie. Peut-être qu'elle l'avait égaré, inscouciante qu'un jour, des mauvais temps couvriraient son monde ensoleillé. Peut-être qu'ensuite elle avait fait un bout de chemin, s'abritant ici et là, pour un jour arriver près de lui.

Et selon moi, ce qui arrive ensuite est d'un classique tel qu'il me répugne de sauter dans toutes ces flaques de clichés en vous les racontant. Mais c'est tellement beau que... bon voilà.

Sous ce parapluie, ils se sont embrassé, puis sont devenu charmant et charmée. Ils se sont aimé sans trop se poser de questions et tranquillement, il lui est entré dans la peau.

Pour revenir à notre point de départ, l'ombre au tableau se profile, quelques nuages, et 90% de probabilité d'averses. Un seul parapluie c'est bien beau pour deux, mais la distance, les aléas de la vie et le prix de l'essence séparent nos deux amants. Elle se retrouve donc expulsée du-dit parapluie.



À attendre...





4 commentaires:

elPadawan a dit…

Quel beau texte... mais triste.

Il faut la plonger dans une piscine, que dans toute cette eau on ne voie pas ses larmes... ;)

Daniel Paillé a dit…

Ben oui, c'est triste...
Bize

Plume a dit…

mais voyons, pourquoi est-ce que je ne trouve pas ça si triste ? Hehe. Souriez les gars. xxx

William Drouin a dit…

Ce texte est différent de tes autres textes. Il est moins centré sur le «moi», ce qui est très bon.

Sujet intéressant : la lucidité, les tentatives de saisir le présent, le réel, vs l'inertie, l'attente, être dans la lune etc. Le personnage attend un moment d'hyperréalité, un moment ou le présent et le réel se donnerait à elle en entier. C'est un sujet passionnant. Mais qu'est-ce qu'elle souhaite au fond? Qu'est-ce qui EST réel, présent et qu'est-ce qui incarne le désir de lucidité? Le parapluie, je crois. C'est bien choisi.

Je ne parle pas de l'amour qu'il y a, ou de l'histoire d'amour dans ton texte je trouve qu'elle est garochée, mal amenée (peut être même inutile, parce qu'on le sent qu'elle a un désir, amour, aussi) Tu serais peut-être mieux de pas dire C'EST CLICHÉ quand c'est cliché. On s'en fout que ce soit cliché on aime ça pareil.

Y a une bonne raison pour laquelle ton texte est à la 3e pers. singulier : les apartés en italique. C'est dans ces moments-là que la narratrice parle au JE.
Et c'est là qu'est l'originalité je trouve, dans le PEUT-ETRE que...
peut-être qu'elle avait eu un parapluie, etc.

On avait à faire à une narratrice qu'on croyait omnisciente, une nattrice «dieu» alors qu'elle ne l'est pas. elle n'est pas tout à fait au courant de qui est la demoiselle. Conserve ça c'est assez surprenant.

Sauf que le «peut-être» (de la «théorie» de la narratrice) est abandonné, lâché comme ça pouf avec le :

«Sous ce parapluie ils se sont embrassés»

T'as lâché le peut-être? Je comprends plus. Est-ce qu'on est encore dans le peut-être ou si on est dans la certitude? Ça serait l'fun qu'on le sache plus clairement, parce que j'ai trouvé que le peut-être était un moment fort de ton texte. Et si tu le mènes à rien, je trouve que ça se dégonfle...

Très bien le truc des prévisions météo, hyper réaliste, on dirait qu'avec ça, le personnage de la demoiselle en a pour son argent: tu voulais du concret, de la lucidité présente réelle, ben les statistiques météo tentent toujours de s'accrocher le plus possible à ce que le présent sera. Bref...

La fin : «Elle se retrouve expulsée...» ? Là, non seulement je ne sais plus si on est encore dans le PEUT-ETRE, mais je ne comprends pas pourquoi on est au présent alors que tout le texte est au passé composé je crois.

C'est parce que c'est en italique que c'est au présent? Ben... ça reste un bout d'histoire... Non on dirait une maladresse d'avoir mis le «elle se retrouve...» dans l'italique. Il va pas là.

Voilà mes commentaires à moi :) En tout cas, c'est ce que j'ai senti!